Chers collègues, je souhaite tout d’abord excuser l’absence de notre collègue Nicolas Lebas, retenu ce soir par des obligations professionnelles et qui nous a aidé à préparer cette intervention.
Violette Spillebout
Madame le Maire,
Parmi les affaires courantes, il y a la traditionnelle adoption du compte administratif de l’année écoulée, cette année 2020 tellement inattendue et perturbée, qui a mis à l’épreuve notre santé, nos familles, nos entreprises, nos organisations, nos caractères. Cette année 2020 a profondément affecté la vie des français et parmi eux la vie des lilloises et des lillois qui reçoivent le déconfinement progressif du pays comme un souffle d’espoir dont les nouvelles quotidiennes, parfois contradictoires, viennent toutefois nous rappeler la fragilité.
Alors, au risque de vous surprendre, nous allons vous concéder un satisfecit ce soir : en 2020, malgré la crise – je n’ose dire ici : grâce à la crise – la situation financière de la ville s’est améliorée.
Les recettes de fonctionnement (retraitées des produits de cessions) diminuent certes légèrement, mais les charges diminuent également ce qui contribue à améliorer l’autofinancement et à rétablir nos équilibres.
Logiquement, le résultat (toujours retraité des produits de cessions) augmente.
La dette, quant à elle, diminue et repasse sous la barre des 350 M€ (exactement 345 M€). C’est-à-dire le niveau des années 2012/2013.
Il est cependant étrange de constater que les finances de ville se sont assainies au cœur de la plus grave crise sanitaire et de la plus sévère crise économique traversée par notre pays depuis l’après-guerre.
Au moment de nous prononcer sur le compte administratif, il n’est pas illégitime de chercher à en comprendre la cause même si la question en choquera peut-être certains :
la crise aurait-elle profité aux finances de la ville ? Et si oui, pourquoi ?
Cette question est d’autant plus légitime que les pouvoirs publics d’une manière générale se sont puissamment mobilisés au soutien des français et des lillois touchés par la crise :
- L’Etat tout d’abord qui a traduit concrètement la volonté du Président de la République de soutenir l’économie du pays « quoiqu’il en coûte » en mettant en place le fonds de solidarité, l’activité partielle, le prêt garanti par l’Etat, l’aide aux charges fixes, le dispositif loyer, l’aide aux stocks : pour le seul Département du Nord, ce sont plus de 50 000 entreprises qui ont reçu 630 millions d’€ de fonds de solidarité et 4,5 milliards de PGE accordés à 18 000 entreprises. Ce sont également 84 millions d’heures d’activité partielle indemnisées.
- La Région et la MEL ensuite qui se sont efforcées de compléter les dispositifs nationaux par des outils plus fins avec la volonté de s’adapter aux caractéristiques des bassins de vie concernés.
- Le Département également qui s’est adapté dans l’exercice de ses compétences sociales pour anticiper les difficultés.
Pour l’Etat, comme pour la Région et pour la MEL, ces mesures ont un coût important qui vient dégrader directement la situation des comptes publics. Nous étions hier avec mes collègues Ingrid Brulant et Ali Douffi, au Conseil de la MEL pour le constater.
A Lille, cette année, à la lecture de votre compte administratif, il n’en est rien.
Ou si peu que l’on peut se demander si la ville a réellement joué son rôle d’amortisseur de crise vis à vis des plus exposés et des plus démunis.
Des discours et des incantations il y en a eu certes, mais quelles mesures fortes ont été véritablement engagées : on aurait pu penser à la gratuité de la cantine ou de la garderie ou encore au prêt d’ordinateurs ou de clef wifi pour les étudiants, à des repas gratuits pour les plus éprouvés ou même à une dotation exceptionnelle à la Fondation du Nord.
Seulement, 4% de plus pour les associations, alors que les commerçants, les artisans, les indépendants, les étudiants étaient très éprouvés et espéraient de l’aide, sans toujours oser la demander.
Vous osez même, ce soir, dans une délibération de notre conseil (la Numéro 21/290 contre laquelle nous voterons), réclamer plus d’un an après aux associations de commerçants, le trop-perçu pour des manifestations qui n’ont pu être réalisées. Et dans le même temps vous versez 2,3M€ à Lille 3000 qui n’a rien produit et s’en encore enrichi.
Au passage, vous reprenez 1 M€ à la commune associée de Lomme qui certes vous apporte ses voix mais se retrouve ainsi privée de vos largesses.
Que penser également de cette subvention de 20 000 € à Eurasanté quand les comptes sont aussi bons ? Tout cela donne le sentiment d’un 2 poids, 2 mesures où l’argent ne va pas vers celles et ceux à Lille dont les besoins sont les plus criants.
Vous auriez pu choisir de contraindre ainsi les dépenses de fonctionnement pour dégager des ressources et investir mais là aussi, on cherche en vain : où sont les investissements pour la relance, pour préparer l’avenir ?
En 2020, les dépenses d’équipement ont diminué de 18 % soit 11M€ alors que c’était précisément le moment pour amorcer la relance et donner corps aux investissements promis dans votre programme et – pour certains – attendus par les lillois, notamment dans les écoles et les équipements sportifs.
J’en viens à l’expression de notre position de vote. Voter contre le compte administratif n’a pas de sens car cela reviendrait à nier la traduction comptable de la réalité, l’approuver ferait de nous les complices de décisions auxquelles nous ne souscrivons pas, aussi notre abstention revêt un caractère éminemment politique pour marquer notre désaccord avec les choix retracés dans ce compte administratif 2020 qui n’ont pas été à la hauteur des besoins des Lillois.
J’indique pour finir que nous voterons le compte de gestion qui n’appelle pas de réserves de notre part.
Je vous remercie.