Conseil Municipal

Conseil Municipal : Sauvons le Goethe Institut !

Intervention de Vanessa Duhamel, Conseillère municipale et métropolitaine à Lille, Cheffe de file du MoDem Lillois

Madame le Maire, chers collègues ;

C’est Goethe qu’on assassine, peut-on dire ce soir en parodiant le titre du roman célèbre de Gilbert Cesbron, qui précisément décrivait un divorce. L’Institut Goethe, qui est un élément essentiel de l’échange interculturel franco-allemand, de la promotion de la langue allemande, et de la mise en réseau des scènes culturelles de l’Allemagne et de la France a décidé de fermer trois de ses cinq antennes, installées à Lille, Strasbourg et Bordeaux. A l’occasion de cette délibération, nous tenions à réagir fortement et amorcer ensemble une réflexion sur ce que signifie la fermeture annoncée de cette institution lilloise.

Cette situation exprime bien un paradoxe européen : on ne cesse de vanter le couple franco-allemand et d’appeler au nécessaire renforcement du lien culturel entre nos deux pays, mais l’enseignement des langues européennes se détériore si l’on excepte l’anglais. 

Nous avons pourtant célébré cette année les cinquante ans du Traité de l’Élysée signé par le général De Gaulle et le chancelier Adenauer. 

Nous évoquons ce soir de l’enseignement de la langue allemande, mais on pourrait tout aussi bien songer à l’espagnol ou l’italien. L’esprit européen se nourrit de la diversité, la fermeture annoncée de l’Institut Goethe est donc un repli de l’esprit européen dans notre ville au-delà d’être le symptôme du recul important de l’enseignement de la langue allemande dans notre pays. C’est un fait regrettable, plus que le résultat d’une absence de volonté politique. Il est désormais loin le temps où l’allemand était la première langue enseignée dans les collèges et les lycées d’enseignement général, alors même que les stigmates encore récents des deux conflits mondiaux auraient pu en détourner notre jeunesse. 

«  Celui qui ne connaît pas les langues étrangères ne connaît rien de sa propre langue », écrivait Goethe dans ses « maximes et réflexions ». A l’heure ou l’anglo-américain familier devient la seconde langue de notre jeunesse abreuvée par Netflix, au point qu’elle n’est plus étrangère mais commune, nous déplorons que pour des considérations économiques, peut-être du fait d’un manque d’ambition culturelle de nos amis et partenaires allemands, l’Institut Goethe soit voué à la fermeture dans notre ville. 

Nous souhaiterions que notre municipalité pallie cette situation en favorisant l’enseignement de la langue allemande dans le panel de l’offre culturelle et périscolaire de la ville de Lille. 


Nous proposons également que se mettent autour d’une table, non seulement les sponsors et partenaires actuels de l’Institut, mais aussi tous ceux qui œuvrent dans ce secteur du plurilinguisme :

– À l’heure actuelle, apportent déjà leur concours à l’Institut : le Rectorat, le Conseil Régional, le Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), ainsi que notre Ville, bien sûr ;

– Pourraient s’adjoindre, avec une dimension transfrontalière, les collectivités de l’Eurométropole de Lille-Kortrijk-Tournai, la Chambre de Commerce et d’Industrie, les Universités lilloises, ainsi que par exemple les établissements dispensant un enseignement linguistique.

Notre Ville serait légitime à initier cette table ronde en raison des liens étroits qu’elle a noués de longue date avec ses villes jumelles : rappelons, d’une part, que, dès juillet 1958 (préfigurant en quelque sorte la construction européenne), Lille et cinq autres villes d’Europe décidaient de se jumeler, au nombre desquelles la Ville de Cologne, et que, d’autre part, en 1988, un an avant la chute du mur de Berlin, notre cité se jumelait avec la ville d’Erfurt, alors en RDA ; l’un des buts explicites de ce jumelage étant de favoriser la « promotion de la langue et de la culture ».


C’est bien dans cet objectif que pourraient donc être recherchés les moyens d’assurer le maintien de l’Institut Goethe de Lille, en l’appuyant sur des bases nouvelles, au prix d’une réorganisation ou de redéploiement vers des domaines élargis, en matière d’échanges et de tourisme, par exemple…

Nous formons le vœu que cette démarche commune auprès des autorités françaises et allemandes concernées puisse permettre de sauvegarder l’Institut Goethe de Lille, partenaire essentiel dans les relations franco-allemandes et acteur culturel important de notre territoire. 

Nous sommes pour notre part tout à fait disposés à participer à une discussion sur les solutions à adopter pour pallier cette situation au niveau municipal.

Je vous remercie, 

Vanessa DUHAMEL