Conseil Municipal

Soutien à Eurasanté

Conseil municipal du 20 juin 2024

Intervention de Violette SPILLEBOUT, Conseillère municipale et Députée du Nord

Madame le Maire, chers collègues,

Depuis sa création, en 1996, le Groupement d’intérêt économique (GIE) Eurasanté œuvre au développement d’un écosystème scientifique d’envergure européenne dans la région Lilloise. Sous l’impulsion de Pierre Mauroy, il s’est rapidement positionné, au fil des ans, comme le véritable pôle d’excellence de la filière Santé, Alimentation et Bien-Vieillir de la Région Hauts de France.

Le Parc Eurasanté se situe au cœur de l’un des plus grands campus hospitalo-universitaires d’Europe, doté de 300 hectares, en proximité directe du CHU de Lille et de la Faculté de Santé. Dix hôpitaux y sont abrités, ainsi que 200 entreprises, 5 facultés thématiques et 7 écoles paramédicales.

Surtout, le GIE fédère 80 laboratoires associant 4000 chercheurs, autour de thématiques d’importance majeure : cancer, pathologies neuro-dégénératives, maladies chroniques de l’intestin, maladies inflammatoires etc.

A cet égard, le groupe Faire Respirer Lille tient à saluer l’exceptionnelle découverte accomplie par une équipe de chercheurs du CHU de Lille, menée par les éminents Pr David Devos, neurologue et pharmacologue et son confrère le Pr Thierry Burnouf. Cette équipe ouvre une voie très prometteuse dans la lutte contre la maladie de Charcot en injectant un traitement à base de plaquettes sanguines dans le cerveau. Il s’agit-là d’une avancée majeure pour les 500 000 personnes touchées dans le monde par cette terrible maladie. Le CHU de Lille prouve une fois encore qu’il est à la pointe de la recherche mondiale. Nous nous en réjouissons.

Permettant à la fois l’accélération de la R&D et l’application industrielle et entrepreneuriale du savoir scientifique, Eurasanté fait la fierté des Lillois et de la région entière. 

Il est donc, à ce titre, permis de s’interroger sur la faiblesse, voire l’insignifiance, de l’aide de la Ville de Lille à Eurasanté. Par la présente délibération, il est en effet demandé au Conseil municipal d’autoriser le versement d’une subvention de 20 000 euros au GIE. Comparé au budget de 10 millions d’euros d’Eurasanté, ou encore aux contributions de 1,5 million d’euros chacune de la MEL et de la Région, le chiffre est dérisoire. Il a cependant pour mérite de mettre en lumière le profond désintérêt de la Municipalité pour ses filières d’excellence, pour ses chercheurs et ses entreprises, lesquels risquent, et cela est un fait, d’être laissés sur le bord de la route de la compétition scientifique internationale.

Ainsi, faute d’un soutien suffisant, Eurasanté a perdu les deux vagues successives en 2022 et 2023, de l’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) national « Biocluster » du Plan Innovation Santé 2030. Ce sont des centaines de millions d’euros qui échappent de ce fait à Eurasanté et à son programme-candidat centré sur le traitement et la prévention des maladies chroniques.

Programme d’utilité publique, car, comme on le sait, la région Hauts-de-France, avec ses six millions d’habitants, se caractérise par une prévalence particulière des maladies chroniques.

Pendant ce temps, il faut le rappeler, les autres collectivités investissent. Elles investissent même massivement : à Marseille, le projet « MIB » lauréat de l’AMI Biocluster, se voit doter d’une enveloppe de 97 millions d’euros, avec pour objectif le développement de médicaments contre le cancer, les maladies auto-immunes et les maladies infectieuses.

Dans la région Ile-de-France, le Paris Saclay Cancer Cluster, rassemblant les acteurs clés de l’innovation oncologique, contribue depuis 2022 à relocaliser les capacités de R&D pour les nouvelles thérapies contre le cancer.

Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, Lyonbiopôle a accompagné 200 projets, pour un montant total de 109 millions d’euros, et ce, seulement pour l’année 2023.

Récemment, les pôles de santé BioValley à Strasbourg, Eurobiomed à Marseille, Lyonbiopôle à Lyon et Medicen à Paris, se sont réunis au sein de l’alliance Enosis, en coordination avec l’Agence Innovation Santé (AIS) et Bpifrance.

De cette alliance, Eurasanté semble exclue, sans que la Municipalité, manifestement, ne s’en alarme. Elle préfère dépenser ses fonds ailleurs, par exemple dans le programme Lille 3000, véritable tonneau des danaïdes des finances lilloises, crédité cette année de 2,7 millions d’euros.

Nous appelons donc la Municipalité à revoir ses priorités. Entre l’excellence, la recherche scientifique, la santé des Lillois, et un programme culturel dispendieux et opaque, d’ailleurs accablé par la Chambre régionale des comptes en 2019, le Groupe Faire Respirer Lille a fait son choix.

En 2022, vous avez fait preuve d’une grande générosité avec Euratechnologies lors de leur augmentation de capital. Pourtant, dans le même temps, vous adoptez une attitude mesquine envers Eurasanté. Pourquoi cette disparité de traitement ? Quelles sont vos priorités réelles pour l’avenir de notre ville ?

Les citoyens méritent de savoir comment et pourquoi certaines initiatives sont favorisées au détriment d’autres. Nous attendons des réponses claires et des actions concrètes pour un soutien équilibré et équitable à tous nos pôles d’excellence. Lille mérite mieux que des politiques à deux vitesses

Nous invitons donc la Mairie, contre toute tentative mortifère de déclassement, à sérieusement renforcer son soutien à Eurasanté, ainsi qu’à nos médecins, scientifiques et entrepreneurs, éléments essentiels du rayonnement de notre Ville et du bien-être des Lillois.

Je vous remercie.