Conseil municipal du 7 février 2025
Oeuvres d’art dans l’espace public
Madame le Maire, chers collègues ;
La présente délibération relative au budget consacré à la réalisation d’œuvres d’art dans l’espace public lillois est l’occasion d’évoquer ce formidable levier de dynamisation culturelle et d’appropriation de l’espace par les habitants.
Nous partageons pleinement l’idée que l’art dans l’espace public joue un rôle essentiel. Il contribue à l’expression artistique libre, renforce la cohésion sociale, dynamise notre territoire et favorise la participation citoyenne. Le rapport du Cycle des Hautes Études de la Culture (CHEC) sur l’investissement des espaces publics par la création rappelle d’ailleurs combien l’art peut être un levier d’appropriation et d’échange, à condition d’être pensé avec et pour les habitants.
Or, précisément, force est de constater que la manière dont sont sélectionnées et installées ces œuvres est sujette à débat.
Qui décide, tout d’abord, des œuvres qui transforment notre ville ?
Le choix des artistes et des œuvres installées dans l’espace public lillois est effectué par un comité composé de représentants des villes associées (Lille, Lomme, Hellemmes), de la DRAC, du rectorat, des services de l’Éducation nationale et de divers acteurs culturels locaux.
Les habitants, et leurs conseils de quartier, n’y sont pas associés.
Pourtant, ces œuvres transforment durablement notre espace public, modifient la perception des lieux et s’imposent aux riverains sans qu’ils aient été consultés en amont. Quand une œuvre d’art est installée dans un quartier, elle ne devrait pas y être « parachutée » sans dialogue avec celles et ceux qui y vivent.
Le rapport du CHEC met en évidence un enjeu majeur : sans concertation, l’art public peut devenir une source de tension et de rejet, alors qu’il devrait être un élément de cohésion et de fierté locale.
Mais également, une politique tournée vers l’extérieur, au détriment des talents locaux.
A cet égard, le déséquilibre est frappant entre les artistes sélectionnés et nos talents chtimis.
Les quatre artistes cités dans la présente délibération sont Hervé Di Rosa, né à Sète et basé dans le Sud de la France, Etel Adan, Parisienne née à Beyrouth, Xavier Veilhan, Parisien né à Lyon, et JonOne, Parisien né à New York.
On peut également évoquer Yayoi Kusama, artiste Japonaise ayant vécu à New York, dont « Les Tulipes de Shangri-La » ont été acquises dans le cadre du programme « Lille, Ville d’Art et d’Artistes ».
La question aussitôt s’impose : où sont les artistes Lillois ?
Notre commune regorge de talents, d’artistes qui créent, interrogent, bousculent et dialoguent avec notre territoire. Mais ces talents sont trop souvent écartés au profit d’artistes choisis ailleurs, la plupart du temps dépourvus de lien avec notre ville et son histoire.
Pourquoi ce désintérêt pour ceux qui vivent et créent ici ? Pourquoi ne pas donner aux artistes Lillois une place centrale dans notre politique culturelle ?
Nous vous appelons à inclure un critère de lien avec notre commune dans l’attribution des commandes publiques.
L’art public, enfin, doit être une expression partagée, et non une décision descendante.
L’espace public revient en partage aux habitants ; on ne peut y installer des œuvres d’art sans solliciter leur avis !
Loin de nous l’idée de remettre en cause la liberté artistique, mais quand une œuvre est financée par de l’argent public et s’impose durablement dans le quotidien des habitants, elle doit faire l’objet d’une véritable concertation.
C’est pourquoi nous demandons que la commune associe en chaque occurrence les conseils de quartier et les habitants aux décisions relatives aux œuvres artistiques dans l’espace public, en amont des projets.
Concrètement, cela signifie :
🔹 Une consultation obligatoire des conseils de quartier avant toute implantation artistique majeure ;
🔹 Un espace de dialogue ouvert avec les habitants pour recueillir leurs avis et propositions ;
🔹 Une transparence accrue sur le financement des œuvres, notamment dans un contexte budgétaire contraint ;
🔹 Un accompagnement pédagogique et des actions de médiation culturelle pour favoriser l’adhésion locale.
L’art dans l’espace public ne doit pas être un simple outil de communication politique ou une décision descendante. Il doit être un levier de démocratie participative et d’appropriation collective.
Nous voulons une ville où l’art s’exprime, mais aussi une ville où l’on écoute ses habitants.
Je vous remercie.
Vanessa Duhamel