Madame le Maire,
Chers collègues,
Le sujet complexe de la déconjugalisation de l’AAH, et l’hystérisation des débats nationaux récents, appelle de nous tous de l’humilité et du sérieux, et certainement pas de s’abaisser à des manœuvres politiciennes, comme celle d’amener, par un voeu d’un groupe politique, un débat national au coeur du Conseil Municipal de notre ville, qui n’en est pas le lieu. Notre groupe Faire Respirer Lille ne prendra donc pas part au vote.
Derrière cette question, se jouent en effet des questions profondes de notre modèle de société : pour certains, dans le système actuel, les personnes handicapées ne sont pas reconnues comme autonomes et indépendantes, mais sont au contraire soumises à la dépendance envers la personne avec qui elles partagent leur vie. Pour d’autres, cette allocation est un minima social, qui fait partie des mécanismes de la solidarité nationale, et qui considère chaque foyer de façon équitable, comme un tout, pour l’attribution des aides sociales comme pour le calcul fiscal. Rien n’est simple.
C’est pourquoi nous pouvons regretter le parcours « baroque » de cette proposition de loi, pile au moment des élections, qui témoigne davantage d’une coalition des oppositions, et donc d’une manoeuvre politique, que d’une initiative parlementaire sincère à l’endroit des personnes handicapées. Ce, d’autant plus qu’elle a peu de chance d’achever son parcours législatif d’ici 2022.
Ce vœu, ce soir me donne néanmoins l’occasion de valoriser l’action de la majorité présidentielle s’agissant des personnes handicapées.
Car c’est bien l’actuelle majorité présidentielle et non la précédente qui a procédé depuis 2017 à des revalorisations successives de l’AAH, qui sera passée de 810€ à 903€ !
C’est une augmentation inédite et un effort budgétaire de 2,5 milliards d’euros sur l’ensemble du quinquennat.
Le Gouvernement a fait du handicap une de ses priorités car c’est l’affaire de tous à travers chaque politique publique : l’accès à l’école, à la formation et à l’emploi, l’obtention d’un logement digne, etc :
- 2 milliards d’euros ont été investis pour l’école inclusive : en hausse de 60% ! … Ce sont 65 000 enfants handicapés qui peuvent aller à l’école : 20% de plus qu’en 2017. Ce sont 220 000 enfants avec un accompagnant : 45% de plus qu’il y a 4 ans ! ;
- D’autres mesures concrètes sont prises, comme la mise en place du congé pour les proches aidants, le rétablissement du droit de vote pour les personnes sous tutelle ou encore l’attribution à vie de l’AAH aux bénéficiaires dont le handicap n’est pas susceptible d’évoluer. Nous épargnons à 100 000 personnes des démarches pénibles pour avoir à « prouver » régulièrement leur handicap.
Ensuite, pour en revenir au sujet de la déconjugalisation, nous sommes surpris, au vu de vos anciennes responsabilités, que vous appeliez à des aides ne tenant plus compte des revenus des foyers, ce dont rêvent les économistes les plus libéraux …
Pourtant, ce nouveau système ferait 44 000 « perdants » ! Des couples dont le bénéficiaire AAH travaille mais dont le conjoint dispose de faibles revenus : leur AAH serait réduite, et 21% d’entre eux perdraient totalement le bénéfice de l’allocation ! Êtes-vous certaine de vouloir cela ? Le dispositif transitoire proposé par les sénateurs s’avère, vous le savez, impossible à mettre en œuvre par les Caisses d’allocations familiales.
Pour finir, un projet de loi sur le grand âge, les questions d’autonomie et de handicap sera débattu à l’automne au parlement. Je vous invite d’ores et déjà à engager les instances locales de concertation, notamment notre commission accessibilité, à y réfléchir pour alimenter le débat parlementaire de manière constructive.
Notre groupe sera alors heureux de transmettre les bonnes idées des Lilloises et des Lillois et pourquoi pas de voter une délibération qui fera partie des attributions de notre assemblée.
Pour toutes ces raisons, nous ne prendrons pas part au vote sur ce vœu.
Je vous remercie.