Madame le Maire, chers collègues,
Voici la quatrième année que nous passons au crible le compte administratif de la ville de Lille. Il ne s’agit que de constater l’exécution budgétaire de l’année 2023, sans donc possibilité de modification de notre part. Cet exercice n’empêche pas une vigilance critique du groupe d’opposition que nous représentons. Au contraire, le budget, en tant que traduction chiffrée des politiques publiques, constitue le support naturel d’un juste débat démocratique autour des choix, souvent contestables, de la Municipalité.
L’année 2023 a été marquée par un contexte national agité, que ne peuvent manquer de refléter les comptes de la Nation, et par ricochet, le présent compte administratif. L’actualité plus récente nous préoccupe davantage. La victoire du Rassemblement National aux élections européennes s’explique, il nous semble, par l’expérience partagée entre de nombreux citoyens, l’expérience ressentie ou vécue, face à la disparition des services publics, face à l’effritement d’un certain modèle social et à l’heure où les inégalités progressent et les gains du travail se font plus difficiles, d’un lent mais irrémédiable abandon de la part des gouvernants que vous êtes et que nous sommes.
La situation actuelle nous pose cette question : servons-nous assez le citoyen ? Servons-nous assez le contribuable ? Il est entendu que la vie en collectivité ne peut se comprendre sous l’unique prisme coût/bénéfice, taxe/prestation. Cela ne nous abstient cependant pas d’une réflexion ambitieuse sur la qualité de nos politiques publiques et sur leur contribution effective au bien-être de tous et de chacun.
En 2023, les recettes de la Ville ont augmenté de 37M d’euros. Cette augmentation, qui n’est pour l’essentiel, pas du fait de la Municipalité, demeure la conséquence de certaines décisions particulièrement brutales pour les Lillois. Les frais de stationnement, imposés sans concertation des conseils de quartier, ont ainsi bondi de 40 %. Or, cette augmentation, pour reprendre le raisonnement développé plus haut, est-elle couplée, comme nous le souhaiterions, à un véritable programme de mobilités douces et durables dont le rayonnement métropolitain permettrait aux Lillois et habitants des communes voisines de trouver un substitut abordable à la voiture ? En d’autres termes, l’effort financier demandé aux automobilistes se traduit-il par un effort équivalent de la Municipalité en faveur des usagers des transports publics ? La réponse est non. Encore une fois, la Mairie prend, mais ne donne pas.
En ce qui concerne les dépenses, elles évoluent de 6,6% soit 24M€. Cette augmentation des dépenses est en partie liée, comme en 2022, à l’augmentation de la masse salariale induite par la revalorisation du SMIC, du point d’indice et du pouvoir d’achat, décidée par le Gouvernement. Si l’on peut se réjouir, avec les agents de la fonction publique territoriale, de cette revalorisation longtemps attendue, si nécessaire en cette période inflationniste, le Groupe FRL appelle la Municipalité à mener une véritable réflexion sur la qualité des services offerts aux Lillois au regard de l’importance des frais de personnel. Ceux-ci sont en effet toujours aussi élevés avec 922€ par habitant alors que la strate se situe à 718€. Cela permet-il aux Lillois de mieux vivre qu’ailleurs ? En outre, nous rappelons la priorité de la lutte contre l’absentéisme au sein des services municipaux, lequel représente environ 500 EPT, soit une charge aussi inutile qu’injuste pour le contribuable.
Enfin, les charges augmentent de 8%, soit 290€ par habitant alors que les autres villes sont à 261€. Malgré cette augmentation de la dépense, les subventions aux associations sont pratiquement stables. Ainsi, si le budget de la ville augmente de près de 9 %, la Municipalité choisit de consacrer cette somme à ses dépenses de structure, sans en faire profiter les associations qui pourtant, subissent les mêmes évolutions des coûts. Le Groupe Faire Respirer Lille rappelle l’absolue nécessité des associations lilloises, pour le maintien des solidarités, du cadre de vie, des corps intermédiaires ; pour le resserrement du tissu social et la vivacité de nos traditions. Notons toutefois le déplorable entêtement de la Mairie en faveur de l’association Lille 3000, généreusement abondée de 2,7 M d’euros en 2023 et dont l’impact social reste encore à prouver… En dernier lieu, une analyse régulière de compte administratif ne peut faire l’impasse sur la question de l’efficacité de la dépense publique :
– Aménagement des espaces urbains (Place Rihour)
– Efficacité des rénovations et travaux (Pavés à remplacer Place des Buisses)
Suite à l’examen de ce compte administratif, des questions continuent à se poser. Circule-t-on mieux à Lille qu’en 2020 ? Se loge-t-on mieux, dans de meilleurs logements et dans des logements plus abordables ? Profite-t-on de davantage d’espaces verts ? Est-ce que nos commerces et nos zones d’activité se développent ? Se déplace-t-on plus en transports en commun ? Est-on plus en sécurité ? Les citoyens sont-ils davantage associés aux décisions de la Ville ? Prend-on enfin au sérieux les enjeux de la transition écologique ? En un mot, respire-t-on mieux à Lille ?
Je vous remercie.