Conseil Municipal du 21 novembre 2025
INTRODUCTION
Nous nous épargnerons le traditionnel volet de complaintes contre l’État dans ce débat, qui voit chaque année la majorité sortante pester contre les décisions du gouvernement au travers du Projet de Loi de Finances pour l’année à venir. Mais voilà, cette année il sera plus difficile de tout flanquer sur le dos du PLF puisque :
- premièrement, on n’en connaît pas encore les contours finaux ;
- deuxièmement, s’il finissait par voir le jour ce serait forcément avec l’assentiment de plusieurs des composantes partisanes de notre conseil, ce qui pourrait obliger certains à faire leur autocritique (et on sait tous que cela n’a jamais été le genre de la maison) ;
- troisièmement, dès l’introduction du Rapport qui nous est présenté, on apprend que dans les projections fournies, aucun compte n’a été tenu des réflexions nationales en cours. Ce qui me semble une sage décision, tant les inconnues sont nombreuses.
J’observe d’ailleurs un changement de ton dans votre délibération. Je vous cite : « Les marges de manœuvres sont désormais très réduites », « la situation est fragile »,…Enfin un discours de vérité. Nous arrivons en fin de mandat et c’est l’heure de faire le bilan. Vous laissez LILLE HELLEMMES LOMME dans une situation financière assez inquiétante pour votre successeur.
Si le texte présente une vérité alarmante sur les finances municipales, il manque aussi, comme chaque année, de transparence sur les tendances et prospectives pluriannuelles de la collectivité. Je vous ai même demandé avant ce conseil la communication du Plan Pluriannuel d’investissement, pour que les élus que nous sommes puissent y travailler, et votre seule réponse est que vous l’avez fourni à la CRC. Pourquoi n’aurions nous pas droit, nous, élus d’en disposer ?
Tout cela conforte le climat de défiance des citoyens en leur représentants politiques, et dégrade la qualité du débat démocratique au sein de notre assemblée.
Je fais donc, pour les Lillois, Lommois et Hellemmois ce soir, l’analyse critique de votre ROB, afin que tout soit dit, m’appuyant sur des chiffres, factuels et implacables.
PARTIE 1 :
D’abord : la question de l’épargne nette, ou capacité d’autofinancement, que la commune prévoit de dégager en 2026.
Le montant de notre capacité d’autofinancement pour l’année 2026 est attendu, je cite, « proche de zéro ».
Zéro euro d’épargne nette, ça veut dire quoi ? Dans le meilleur des cas, moins de 10 millions d’euros, ce qui n’a jamais été le cas au cours des deux dernières mandatures. C’est inédit, mais c’est surtout très inquiétant concernant la capacité à se projeter sur des dépenses futures ! Les caisses sont vides !
Pour que chacun comprenne bien ce que cela veut dire : la Ville a toujours, et c’est bien normal puisque la comptabilité publique est faite ainsi, financé une partie de ses investissements grâce à un excédent de sa section de fonctionnement. En 2026, elle ne le pourra pas. Elle devra réemprunter et alourdir encore son endettement.
PARTIE 2 :
Mon deuxième point, c’est que toutes les communes ou presque ont vu leur épargne nette se contracter. Toutes ou presque ont donc réagi « normalement », en responsabilité, en engageant pour beaucoup un plan de réduction des dépenses de fonctionnement, pour d’autres une révision raisonnable de leur plan pluriannuel d’investissement, afin de limiter leurs projets à la réalité de leurs capacités financières. A Lille par contre, c’est l’inverse !
Car voilà, nous sommes actuellement en campagne. Ce Rapport d’Orientation Budgétaire annonce donc que vous avez prévu, en 2026, d’engager l’équivalent de 151 millions d’euros d’investissement.
En présentant une perspective irréaliste de 261 millions d’euros d’investissement à réaliser au cours des deux années 2026 et 2027, la majorité sortante obère l’avenir. Au rythme moyen de réalisation constaté sur le mandat écoulé (pas plus de 80 millions par an en moyenne), ces 261 millions correspondent non pas à deux années mais à trois ! Des promesses et des rêves irréalistes surtout ! Je dirai même plus c’est une présentation très malhonnête de l’avenir pour les Lillois.
Mais en agissant de la sorte, elle hypothèque lourdement tout choix que pourrait faire la prochaine majorité municipale. Le meilleur exemple, que tous les Lillois comprennent aisément, est celui des investissements en matière de piscines municipales : n’ayant rien réalisé à ce sujet au cours des 10 dernières années, tout ce que vous annoncez vouloir faire à l’avenir coûtera infiniment plus cher que ce que vous auriez déjà pu mener à bien jusqu’à aujourd’hui.
PARTIE 3 :
Un troisième point attire forcément notre attention. Sans surprise. C’est celui de la capacité de désendettement.
Vous souvenez-vous du rapport de la Chambre Régionale des Comptes, dont nous avons débattu ici il y a quelques mois ? Il annonçait je cite : « Une situation financière dégradée à partir de 2025 ». Nous y sommes… ou plutôt non, nous sommes déjà au-delà.
Le ROB qui nous est soumis ce soir présente un encours de dette de 414 millions d’euros, supérieur aux prévisions, et une capacité de désendettement portée à 10 années. C’est une évolution considérable, deux fois supérieure à celle prévue.
Il semble donc que la majorité actuelle n’a pas souhaité, au moment de préparer le budget 2026, considérer le rapport de la CRC comme une alerte, un appel à changer de trajectoire pour éviter la « dégradation » qui avait été prophétisée par les magistrats financiers. Au contraire, la situation que nous présente ce ROB s’avère pire que celle qui les inquiétait déjà au moment de finaliser leur rapport.
Monsieur le Maire, il y a là des indicateurs que vous seriez bien avisés de corriger, s’il en est encore temps, avant de nous présenter un budget primitif dans un mois. Pour cela, il y a plusieurs stratégies possibles mais il en existe surtout une, dans laquelle la quasi-totalité des grandes collectivités françaises se sont engouffrées : agir résolument sur le niveau des dépenses de fonctionnement. Un service public efficace, optimisé et des dépenses rigoureusement maîtrisées pour ne pas obérer l’avenir des Lillois, Hellemmois et Lommois.
Faire de vraies priorités budgétaires pour la sécurité, la propreté, le stationnement dans notre ville, sans oublier la solidarité.
