Conseil Municipal

Budget municipal 2021

Madame le Maire, chers collègues,

La crise sanitaire, aura un impact important sur les finances publiques. Partout, les confinements et les restrictions de l’activité ont durement touché l’économie. Nous avons la chance de faire partie d’un pays qui a, dès le début de la crise, tout fait pour que ses conséquences soient atténuées par une véritable solidarité nationale.

Les aides directes aux entreprises, indépendants et professions libérales s’élèvent pour le moment à 40 milliards d’euros, le chômage partiel à 34 milliards, les aides aux ménages les plus fragiles à 5 milliards, sans compter les reports de charges ou les prêts garantis par l’Etat.

Nous sommes dans un des pays les plus protecteurs au monde et pour autant, la situation est difficile pour beaucoup de français et la crise met à l’épreuve le service public communal qui doit faire preuve d’adaptation tout en veillant à l’équilibre de son budget.

Venons-en à ce budget précisément. Pour suivre avec gourmandise le débat budgétaire lillois depuis de nombreuses années et au risque de vous surprendre, nous avons relevé, pour ce 1er budget du mandat, un réel changement. La présentation de ce budget est plus claire, plus détaillée et sans doute plus sincère : moins de dissimulation et davantage d’explications. Et puis surtout la présentation du budget climatique qui apporte un utile éclairage sur vos choix. Ceci ne doit toutefois pas nous faire oublier les points faibles structurels de la ville, qui ne sont toujours pas traités et j’y reviendrai.

S’agissant des recettes tout d’abord, l’impact de la crise est objectivement faible car elles subissent une érosion limitée à 0,9 %.

En effet, les recettes de la Mel (AC et DSC) demeurent stables et la hausse des recettes de l’Etat vient heureusement compenser la baisse des produits de gestion communaux. Ainsi, la DGF augmente de 1 % et le FPIC (fonds de péréquation intercommunal et communal) augmente de 3 %. Surtout, les recettes de la fiscalité augmentent, elles, de 6 %, soit 10 M€. Excusez du peu.

En quoi cela relève-t-il de l’Etat me direz-vous ? C’est que la Taxe d’habitation est en cours de suppression par la volonté du gouvernement. Vous le soulignez dans votre note de présentation, Mme le maire, sans cette réforme, je cite, « à périmètre identique », « sans l’intégration des compensations de TH dans le produit fiscal en lien avec la réforme de la TH, la hausse réelle est seulement de 1,8 % ». Ainsi, cette réforme, bénéficie d’ores et déjà à de nombreux Lillois qui voient leur pouvoir d’achat augmenter, et elle bénéficie également aux finances communales !

Vous avez beau agiter les peurs en tentant de faire croire que les compensations seront moindres en 2030 : à ce jour, l’État compense à la ville de Lille plus que le produit fiscal résultant d’un taux de taxe d’habitation qui est le plus élevé de toutes les communes de plus de 100 000 habitants.

Et comme à chaque vote budgétaire, vous usez jusqu’à la corde l’étude d’un cabinet inconnu qui se base sur la taxe d’habitation fictive d’un Lillois fictif… qui n’existe plus. Car, Mme le maire, les seuls qui paieront encore la taxe d’habitation en 2021 seront parmi les 20% les plus favorisés. Ceux-là vont payer, cette année encore, la taxe d’habitation la plus chère des grandes villes françaises.

Mais l’Etat a décidé de conduire cette réforme sans vous tordre le bras, et compensera à l’avenir des recettes calculées sur les taux élevés appliqués ici à Lille.

Concernant les dépenses, elles sont toujours supérieures aux autres collectivités de même strate : s’agissant des charges de personnel par exemple 835€ / 683€ +22% (Chiffres 2019 Ministère des Finances)

On peut certes saluer la faible augmentation des charges de personnel : 1,5%, mais il faudra encore du temps pour revenir dans les clous et résoudre notamment l’injonction de la Chambre Régionale des Comptes sur le temps de travail.

Par ailleurs, les charges d’achats externes continuent d’augmenter à +2,1% (soit 10 fois plus que l’inflation prise en hypothèse page 6 à 0,2%). Certes la crise Covid implique des coûts supplémentaires. Mais ceux-ci n’auraient-ils pu être compensés par qq économies par ailleurs ? La ville se résout enfin cette année, à adhérer à des centrales d’achat. Une adhésion plus précoce aurait permis des marges de manœuvre pour affronter cette crise.

Enfin vous vous félicitez de la baisse de 10 % des frais financiers. C’est en effet une bonne chose, que nous approchions de la moyenne nationale des villes de plus de 100 000 habitants. Car, avec 32 euros par habitant en 2019, nous restions 23 % au-dessus de la moyenne, avec une dette de 43 % plus élevée que la moyenne, ce qui limitera pour de nombreuses années encore notre capacité d’autofinancement, et donc votre capacité d’investissement.

Car, et c’est une autre faiblesse structurelle, la ville de Lille supporte encore pour longtemps le poids d’une dette toujours très élevée. 1557€ par habitant alors que la strate se situe à 1086€ par habitant. Fin 2021, la dette s’élèvera à 365M€ en hausse de 3,3% (elle était de 383M€ en 2018). C’est un fait et celui-là est particulièrement têtu.

Globalement, nous l’avons dit, ce budget est sérieux mais nous y décelons toutefois un point faible de taille, un réel manque d’anticipation.

Inutile de dire que la crise sanitaire actuelle va mettre à rude épreuve les forces vives de la ville, c’est-à-dire principalement les commerçants et les associations.

Quel est le plan d’aide mis en place par la ville ? Et avec quels moyens ?

La ville propose certes un budget où l’on parle bien de la crise évoquant charges supplémentaires et baisses de recettes. Et dans le même temps, on constate que les aides attribuées aux associations (25,3M€) sont identiques à 2020 et inférieures à 2019 (27M€).

Les associations sont pourtant en première ligne pour aider, conforter, remédier et apporter un peu d’humain dans cette période déstabilisante.

Dans ce budget, on cherche en vain ce qui est mis en place, anticipé, organisé pour endiguer les difficultés à venir et pour en atténuer le coût humain.

Il n’y a pas non plus de réserve de précaution pour faire face au cas où.

Il faut pourtant prévoir les moyens d’aider les forces vives de la ville. La ville doit jouer un rôle contra cyclique et savoir mettre les moyens quand il le faut. Nous nous attendions à voter une enveloppe de quelque M€ supplémentaires pour venir aider, relancer ou conforter les structures affaiblies. Il faut savoir faire les gestes qui s’imposent quand les circonstances le nécessitent. Il est encore temps pour vous ce soir, Madame le Maire, d’en prendre l’engagement et de se donner rendez-vous au BS. 

Conclusion

Ce budget répond aux réalités du passé mais ne prépare pas suffisamment aux défis à venir. C’est la raison pour laquelle le groupe Faire Respirer Lille s’abstiendra sur ce budget comme l’on fait nos collègues à Lomme et à Hellemmes.