Madame le Maire, chers collègues,
Ce soir, vous nous présentez une belle délibération, une délibération qui vise à définir un plan lillois, afin de lutter contre les exclusions et ce pour quatre ans.
Ce PLCE aura effectivement pour objectif de lutter contre la grande pauvreté, contre le non recours aux droits en facilitant l’accès à ceux-ci, et de contribuer au soutien du pouvoir d’achat des plus fragiles : trois axes d’intervention.
Vous précisez bien évidemment que ce plan vient s’inscrire en complément des actions menées par le département, les services de l’État et la métropole et que son contenu sera mis en place d’ici la fin du mandat, une temporalité qui m’interpelle.
Pourquoi avoir initié ce grand plan à la mi-mandat ? Car les chiffres sont là, même si comme vous le précisez, la crise sanitaire et la crise énergétique ont creusé le fossé.
J’aime entendre que notre ville est intimement liée à la promotion des valeurs de solidarité et de justice. J’aime vous entendre le dire, car nous sommes totalement en accord et convaincu que les inégalités doivent être combattues dès le plus jeune âge, mais également en faveur de nos séniors, pour lutter contre l’isolement.
Nous saluons la contribution des habitants, des associations et des élus d’opposition, une contribution qui vous a permis d’enrichir votre réflexion et d’exercer votre choix politique.
Sans la sécurité, il n’y a pas de justice, cette définition représente bien ce qui m’anime aujourd’hui.
Il est assez étonnant de constater que ce plan n’évoque pas la nécessité de développer l’émancipation sociale. Pourtant n’est-ce pas la clé ?
Aujourd’hui, différentes observations peuvent être mises sur la table, car nous déplorons cette frontière longitudinale qui sépare le Nord du Sud de notre ville. Aujourd’hui, la mixité sociale est promue partout, mais cette mixité sociale est dans les faits artificielle.
L’enjeu majeur pour notre ville est la mixité sociale territorialisée, car la ville de Lille, de par sa stratégie en matière de politique de peuplement, est construite de sorte que les Lillois du Nord et les Lillois du Sud se font face. Un face à face entre ceux qui ont et ceux qui n’ont pas, ceux qui vivent et ceux qui survivent.
Pour témoigner de mon expérience personnelle et beaucoup d’entre vous vont s’y retrouver. J’ai vécu plus de 15 ans au boulevard de Strasbourg, au sud de Lille. Depuis chez moi, aller dans le centre-ville relevait d’un parcours du combattant, je n’y allais que deux fois par an.
Toutes les villes rencontrent des problèmes similaires, mais cette politique de peuplement à conduit à parquer toute la misère au sud.
Alors oui, aujourd’hui vous avez notre total soutien sur ce plan qui vise justement à lutter contre ce fléau, tout en développant l’émancipation sociale et l’estime de soi, qui je le précise est primordiale.
Certes une concertation à été effectuée, mais ces choix politiques sont les vôtres. Ce qui m’interpelle, c’est que notre ville compte 122 104 ménages pour 235 000 habitants. Elle dispose également de 140 105 logements, dont près de 10% de logements vacants, soit 1400 foyers disponibles qui pourraient bénéficier à une grande partie des 1800 ménages se déclarant à la rue sur le territoire de la MEL.
Il aurait donc été intéressant d’entendre quel dispositif vous prévoyez à l’avenir, pour récupérer ces logements vacants, par exemple via une action de sous-location qui pourrait être engagée par le CCAS selon le modèle de la startup lilloise solidaire stirrup qui propose des logements vacants aux personnes dans le besoin et qui les accompagne en collaboration avec les acteurs sociaux. De plus, cette mise à disposition gratuite considérée comme un don en nature à une association d’intérêt général est défiscalisée entre 60 et 66% pour les propriétaires.
Il est essentiel de communiquer auprès des propriétaires sur cette solution avantageuse pour les personnes hébergées comme pour eux.
Vous évoquiez la création d’une énième maison qui mobilise de nouvelles ressources humaines et financières et qui risquerait d’atténuer l’efficacité des actions déjà mises en place. A l’heure où l’on parle de plus en plus de guichets uniques, il conviendrait plutôt de mutualiser cette initiative avec les différents acteurs afin de consolider les actions déjà engagées.
Le développement de la communication à destination des habitants serait un moyen de rendre plus efficiente l’action de nos agents en mairie de quartier.
De plus, comme je vous l’ai indiqué en commission, comment définir un plan de lutte contre les exclusions alors que ce plan n’a pas été budgétisé ? Ce plan est porté par le budget solidarité et proximité, un budget constant qui se veut promouvoir toutes les actions. Quelle tranche de ce budget sera allouée au plan en dépit d’autres actions en cours ?
Après quelques recherches, vous avez lancé un appel à projets dont la date d’échéance était fixée au 5 novembre 2019, pour une action en 2020. Cette action visait justement à prévenir l’exclusion et accompagner les plus vulnérables en proposant des actions de solidarité et en mobilisant de façon collective, les personnes en situation d’exclusion sociale. Ce projet avait également pour objectif de renforcer l’accès à l’aide alimentaire, qui je vous le rappelle n’est aujourd’hui sollicitée que par 50% des personnes sans-abri, un chiffre bien bas au regard de leur situation.
La lutte contre l’illettrisme et la fracture numérique devraient également être mises en avant tout comme la lutte contre l’emprise au jeu d’argent qui pour certains ménages , animé d’un espoir irrationnel , est le moyen de contrôler leur destinée au travers du choix de quelques nombres sur une grille.
Vous comprendrez donc que nous restions perplexes, néanmoins nous voterons pour cette délibération qui concerne de nombreux Lillois.
Je vous remercie