Conseil MunicipalLille

Aide à la licence sportive

Conseil municipal du 28 avril 2025

25/222  Sport – Aide à la prise de licence sportive en club pour les familles de la Ville de Lille et ses communes associées.

Monsieur le Maire, chers collègues,

Cela fait maintenant plusieurs années que je vous interpelle sur ce dispositif.

Et je vais vous dire une chose : si je le fais avec autant d’insistance, ce n’est pas par obsession, mais par fidélité.

Fidélité à mes engagements. Fidélité à une certaine idée du sport. Et surtout, fidélité à celles et ceux qu’on oublie trop souvent dans cette assemblée.

En 2021, j’ai formulé une proposition simple : rapprocher l’aide à la licence des familles, en la décentralisant dans les mairies de quartier.

Cette idée, vous l’avez reprise. Elle a été mise en œuvre.

Et je vous le dis sincèrement : c’était une bonne décision.

Elle a permis de raccourcir les distances administratives, et d’ouvrir la porte à des familles, notamment les plus éloignées des guichets de la direction des sports, au Petit Maroc.

Mais rapprocher l’aide, ce n’est pas encore la rendre juste.

Aujourd’hui, cette aide reste enfermée dans des critères devenus inadaptés : Elle n’est réservée aux seuls enfants de 2 à 11 ans, et conditionnée à un quotient familial inférieur à 709 euros. Et ces critères, en l’état, laissent de côté la majorité de ceux qui en auraient besoin.

Il suffit de dépasser ce seuil de quelques euros pour être exclu.

Une mère seule, avec deux enfants, en temps partiel au SMIC, peut ainsi être écartée pour 710 euros de quotient familial.

Un seul euro de plus , et la porte se ferme.

Les chiffres sont sans appel :

Sur plus de 10 400 enfants licenciés à Lille, Lomme et Hellemmes, seuls 2 491 bénéficient de l’aide municipale. Trois enfants sur quatre passent à travers les mailles du filet.

Et cela malgré leur éligibilité.

Ce n’est pas un détail. C’est une injustice structurelle. Et une perte de sens pour une politique censée soutenir les plus fragiles.

Et même lorsque la question d’une revalorisation a été soulevée en commission, la réponse fut révélatrice : “Si on augmente l’aide, les clubs augmenteront leurs prix.” Je ne commenterai pas longuement cette phrase.

Mais quand une licence coûte 150 euros, que l’aide plafonne à 130 euros, et que l’on refuse de mieux soutenir les familles pour éviter un risque hypothétique d’effet d’aubaine, alors ce n’est plus la solidarité que nous défendons, c’est une logique comptable vidée de sens.

Ce n’est pas aux familles de porter la peur d’un éventuel abus.

C’est à la puissance publique d’assumer son rôle.

La revalorisation des montants reste, à mes yeux, une nécessité.

Mais ce soir, c’est une première étape que je vous propose de franchir.

Ce soir, il s’agit simplement d’élargir le périmètre de l’aide, avant d’en approfondir demain l’ambition.

Pendant ce temps, l’État a élargi son soutien à travers le Pass’Sport, offrant une aide plus accessible à des milliers de familles modestes.

À Lille, pourtant, nous persistons à restreindre l’accès, par habitude ou par inertie.

Deux adjoints successifs au sport, suite à mes interpellations répétées, ont fini par reconnaître la nécessité d’élargir ce dispositif.

Votre propre Stratégie Jeunesse, votée ici-même, affirme vouloir “garantir l’égalité d’accès aux pratiques sportives pour tous les jeunes lillois”.

Alors, chers collègues, où est la cohérence entre vos ambitions affichées et vos actes ?

Je me permets également de rappeler : Votre majorité, l’an dernier, a rejeté l’amendement que j’avais déposé pour corriger cette injustice. Et vous, chers collègues de l’opposition, sauf erreur vous vous êtes abstenus.

Ce soir, les Lilloises et les Lillois nous écoutent.

Et ce soir, chacun devra assumer son choix.

Je ne viens pas ici livrer un programme.

Je viens rappeler une évidence : le sport doit être un droit pour tous les enfants, pas un privilège conditionné à un seuil social dépassé.

C’est pourquoi je vous invite solennellement, chers collègues, à voter l’amendement que je déposerai à l’issue de cette séance : un amendement simple, lisible, juste — visant à élargir l’aide municipale à l’ensemble des jeunes mineurs.

S’y opposer, ce serait trahir à la fois vos engagements publics et les attentes des familles.

Enfin, permettez-moi de conclure sur une note plus intime.

Derrière mon immeuble HLM, dans les années 90, nous n’avions pas grand-chose, mais nous avions l’essentiel : l’envie de jouer ensemble.

Pour acheter un ballon, il fallait se cotiser.

Chacun donnait ce qu’il pouvait, quelques pièces rassemblées avec effort.

Et quand le ballon crevait, il n’y avait pas de rires.

Seulement un silence lourd.

Un silence de déception, de tristesse, parce que nous savions qu’il faudrait encore attendre avant d’en avoir un autre.

Aujourd’hui encore, trop d’enfants vivent cela.

Notre responsabilité n’est pas de trier selon des critères abstraits.

Notre responsabilité est de leur tendre la main.

Je vous remercie.