Conseil Municipal

Politique de la Ville

Intervention d’Ali DOUFFI, Conseiller métropolitain et municipal à Lille

Madame le Maire, Chers collègues,

Dans le cadre de la refonte nationale de la politique de la ville, les contrats de ville signés en 2014 sont arrivés à échéance le 31 janvier 2023. Un nouveau cadrage national a été acté visant à l’élaboration des contrats de ville 2024-2030 et au lancement de la présentation de la dynamique “ Quartiers 2030” par l’Etat.

La métropole Européenne de Lille, pilote de la politique de la ville,  travaille ainsi à l’écriture de ce nouveau contrat cadre métropolitain pour la date butoir du 31 mars 2024, contrat Cadre, qui doit être lui-même décliné territorialement en l’occurrence sur Lille. 

Aussi vous nous présentez, pour la dernière fois, une programmation de la politique de la ville “ancienne mouture”, sur la base d’une délibération annuelle bien maigre : pour seule présentation nous disposons d’un tableau excel qui distribue en 2024, 1,8 millions d’ euros à nos acteurs associatifs. 

Rappelons qu’aux côtés de ce budget municipal, les dispositifs et actions financées par l’Etat au profit exclusif des quartiers prioritaires lillois est de plus de 4,1 millions d’euros, et a progressé de près de 10% depuis 2021. Je vous remercie donc sur ce point de rétablir les vérités face aux chiffres officiels, Monsieur Deslandes, alors qu’en commission vous ne faites que taper sur l’État et la préfecture du Nord. 

Alors oui, nous trouvons votre délibération bien maigre, car vous nous n’y rappelez que très brièvement vos priorités : la reconquête des espaces publics par les habitants, l’insertion sociale et professionnelle, en particulier des jeunes et le soutien des activités économiques, le lien social, la lutte contre l’isolement et la citoyenneté.

Au total, 249 actions sont retenues dont 53 sont des actions nouvelles visant, je vous cite à “apporter de nouvelles réponses” aux besoins des habitants.

Mais quelles nouvelles réponses Monsieur Deslandes ? A quels nouveaux besoins répondent-elles ? Lorsque 80% des actions sont reconduites d’année en année, les réponses d’aujourd’hui sont-elles les mêmes que depuis 2014 ? 

Comment ont été établies ces priorités? En commission vous avez expliqué avoir mené des ateliers visant à travailler cette programmation en co-construction. Je ne crois pas que les acteurs de nos quartiers aient été si bien associés,  à moins qu’ils se soient accordés sur le fait que les solutions d’hier doivent être les solutions d’aujourd’hui.

Dans un rapport de 2020, la Cour des Comptes comme d’autres organismes d’évaluation avait regretté que la situation des quartiers ne s’améliore pas. 

Face à ce constat que nous partageons, quelle évaluation avons-nous sur la politique que vous menez à Lille, avant de la reconduire systématiquement sans se poser de questions ? Qu’avez-vous modifié depuis 2023 ? Qu’avez-vous entrepris depuis les émeutes urbaines, ou changé pour mieux répondre aux attentes de nos jeunes ? 

Le budget de la politique de la ville ne doit pas avoir pour seul objectif de pallier au budget fonctionnement de nos structures, mais plutôt de pousser nos structures à innover, à entreprendre, à atteindre des objectifs précis, pour réduire les discriminations territoriales et promouvoir l’égalité des chances.

Je regrette sincèrement que dans une grande ville comme Lille, aucun rapport sérieux, aucune analyse approfondie de l’utilisation et de l’impact de cet argent public ne soit présenté aux contribuables Lillois, Hellemmois et Lommois. Quelle étude sociologique avons-nous ? Comment évolue la mobilité résidentielle ? Quelles sont l’évolution du niveau de vie et de l’emploi ?

Je regrette aussi que nous ne proposions pas à Lille, ville innovante avec Euratechnologies, Eurasanté, Euralimentaire, de vrais partenariats avec nos quartiers, pour promouvoir l’entrepreneuriat. 

Tous les habitants des QPV n’ont pas vocation à devenir entrepreneur et on ne transforme pas un jeune sans formation en PDG, mais l’entreprenariat rencontre l’aspiration de plus d’un tiers des habitants et peut donc avoir un effet d’entraînement. Il y a de beaux programmes comme celui de BPIFrance à saisir par exemple. Nous pourrions aussi réfléchir à l’entreprenariat au féminin qui pourrait être aussi une réponse aux familles monoparentales car elles sont aussi intéressées. 

Si un habitant des QPV quitte le quartier, c’est parce que sa situation s’est améliorée et nous pouvons considérer que c’est une réussite et non un échec. Rappelons-le.

Vous aurez compris ce soir. Nous voterons cette délibération, mais ce qui nous chagrine encore une fois, c’est que nous n’ayons aucune évaluation sur la politique que vous menez, et aucun objectif clair et innovant pour accompagner les talents de nos quartiers.

Je vous remercie.