Conseil Municipal

Conseil Municipal : Conseil lillois de la nuit

Madame le Maire, chers collègues ;

J’aimerais débuter mon propos par un satisfecit : après, comme vous l’écrivez, plusieurs années d’incivilités, de nuisances et d’insécurité, vous paraissez décidée à réagir enfin avec la re-fondation annoncée d’un « conseil Lillois de la nuit ».

Après aussi, il faut bien le dire, de violentes agressions que vous requalifiez délicatement de « problème de sécurité », et une mobilisation sans cesse croissante de riverains, qui à force d’actions médiatiques auront eu partiellement raison de votre longue torpeur.

Ainsi les riverains de l’avenue du Peuple Belge, qui pétitionnent actuellement contre la prostitution diurne à ciel ouvert dans des camionnettes stationnées à demeure, et l’esclavage public de femmes en situation irrégulière sous l’œil sourcilleux de proxénètes impunis, peuvent-ils espérer qu’après quelques hospitalisations de passants agressés, un ou deux homicides par arme à feu et l’incendie du hall d’entrée du Tribunal Judiciaire, vous envisagiez l’improbable constitution d’un « conseil Lillois du jour »…

Mais revenons pour l’heure au sujet de la longue nuit municipale qui nous réunit.

S’agissant du quartier Masséna – Solférino, en pleine dérive – « Dérive », qui, je le rappelle incidemment, est le patronyme d’une boite de nuit ayant succédé début septembre au mythique « Why Not », lequel dans les années 1990 avait rue Maracci causé tant de troubles que les riverains s’étaient constitués en brigades nocturnes filtrant la circulation automobile à l’aide de barrières mobiles – , les acteurs de la sécurité proposent des solutions simples, pratiques et généralement peu onéreuses : 

  1. la piétonisation par plots rétractables de la rue Masséna et des rues adjacentes en fin de semaine, mettant un terme aux rodéos qui menacent les piétons et les « Sans Domicile Fixe » qui doivent utiliser la chaussée compte-tenu de l’encombrement des trottoirs ;
  2. la fermeture aux mêmes heures du parking des halles, lieu d’agressions sexuelles et physiques menées par des individus guettant les étudiants éméchés ;
  3. la multiplications de caméras reliées au Centre de Supervision Urbain annoncé d’abord pour la fin de cette année, puis semble-t-il l’année prochaine, ainsi qu’une coopération permanente entre les polices nationale et municipale, à l’image de ce qui a été mis en place par la ville de Nice, que la police nationale cite régulièrement en exemple ; 
  4. enfin, une concertation active et permanente avec les établissements de nuit Lillois, qui doivent être aidés à assurer la sécurité de leur clientèle, et simultanément responsabilisés dès lors que des débordements non maîtrisés seront constatés ; l’Union des commerçants Masséna – Solférino – Nationale a d’ailleurs réclamé par un communiqué de presse diffusé hier d’être associée aux travaux du conseil. Se pose aussi la question des horaires de fermeture des discothèques, et singulièrement des fausses discothèques dont on a mis bien longtemps à découvrir la floraison…

Au-delà de ces mesures salvatrices, c’est d’une politique de long terme dont notre ville a besoin. A quoi par exemple aura servi la spectaculaire opération de contrôle ayant réuni rue des Postes le 9 septembre 2019 pas moins de 40 policiers, des inspecteurs du travail et des services fiscaux, alors que trois années plus tard les incivilités continuent d’y prospérer et les chauffards d’y multiplier leurs rodéos ?

Pourquoi avoir tiré du lit des inspecteurs de la direction générale des finances publiques le 29 septembre dernier pour un contrôle nocturne suivi d’une lettre aux riverains, alors qu’on présume aisément qu’un contrôleur fiscal est plus alerte et plus attentif au lever du jour sans qu’on comprenne bien ce qu’il peut saisir la nuit qui serait insaisissable le jour ?

Plus cruellement encore, le « collectif Masséna Solférino », publiait le 3 octobre dernier un tweet rappelant un article de la « Voix du Nord » du 11 novembre 2013 dont le titre laisse sans voix, je cite : « Lille : les états généraux de la vie nocturne s’éternisent »… Occasion de rappeler que dans la théologie chrétienne, l’Enfer est éternel… L’adjoint en charge de la vie nocturne déclarait alors :  « Je préfère que ça prenne un peu de temps plutôt que de bâcler quelque chose qui fasse beau à lire ou entendre. » Disons-le franchement 7 ans plus tard, ce n’est ni bâclé faute d’avoir été entrepris, ni non plus beau à lire ou à entendre…

C’est donc avec une grande motivation que je serai proposée par notre groupe comme le représentant au sein de ce conseil, regrettant toutefois qu’aucun suppléant ne puisse être désigné pour un représentant unique qui peut être empêché, aussi motivé soit-il.

J’aurai, je l’espère, l’occasion de participer aux travaux de ce nouveau conseil dans l’esprit constructif qui est le nôtre, et d’y rappeler ce que furent les propositions municipales de « Faire Respirer Lille », telles qu’une présence constante et visible des polices nationale et municipale dans les secteurs les plus sensibles aux heures d’affluence, la multiplication des contrôles d’alcoolémie dans les artères voisines ainsi que l’usage de la loi dite « Osson » du 3 août 2018 autorisant la confiscation des véhicules utilisés pour des rodéos routiers. 

Ainsi pourrons-nous collectivement proposer aux Lillois des solutions concrètes et durables ne négligeant ni notre jeunesse, ni les femmes ni les Lillois dépourvus de domicile, et qui ne se borneront pas, comme le disait notre collègue précité, à « bâcler quelque chose qui fasse beau à lire ou entendre ».

Je vous remercie.

Vanessa Duhamel.