Conseil municipal du 28 avril 2025
Fin de la culpabilisation des victimes
Monsieur le Maire, Chers collègues,
Il y a quelques semaines, la Cour européenne des droits de l’homme a rappelé à la France une vérité douloureuse : notre droit, nos institutions, parfois même nos jugements, restent empreints de stéréotypes patriarcaux qui conduisent à l’injustice. La condamnation de notre pays pour avoir rendu un divorce aux torts exclusifs d’une épouse ayant refusé des rapports sexuels à son mari est plus qu’un signal d’alerte : c’est un appel à l’action.
Cette décision résonne profondément avec les engagements que nous devons porter ici, dans cette enceinte, en tant que représentants de notre ville. Car ce qui se joue dans les tribunaux se joue aussi, tous les jours, dans nos quartiers, nos écoles, nos commissariats, nos associations.
C’est pourquoi j’ai cosigné, aux côtés de Paul Christophe, la proposition de résolution récemment adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale, pour mettre fin à la culpabilisation des victimes de violences physiques, sexuelles et psychologiques. Cette résolution porte une exigence claire : que la justice cesse d’inverser les responsabilités, que la parole des victimes soit enfin accueillie avec respect, et que plus aucun préjugé archaïque ne vienne masquer la réalité des violences subies.
Elle appelle notamment à :
- L’enregistrement de toutes les plaintes, sans condition liée à la visibilité ou à la gravité supposée des blessures,
- Des procédures judiciaires plus respectueuses de la dignité des victimes, de la plainte jusqu’au jugement,
- Et un effort collectif pour briser les tabous qui empêchent encore aujourd’hui trop de femmes – et d’hommes – de parler.
Mais ce combat ne se mène pas uniquement dans les hémicycles. Il se mène ici, dans notre ville. Et c’est précisément l’objet de la délibération qui nous réunit aujourd’hui, à travers l’attribution des subventions aux associations œuvrant pour l’égalité entre les femmes et les hommes, la prévention des violences, l’accompagnement des victimes.
Ces associations, vous le savez, sont en première ligne. Elles accueillent, écoutent, protègent, orientent, parfois sauvent. Leur action est complémentaire – et souvent en avance – sur celle des institutions. Il est de notre responsabilité de leur donner les moyens d’agir.
Je souhaite aussi que notre Ville s’empare pleinement de cette dynamique nouvelle. Il est temps de faire évoluer nos pratiques, d’assurer un meilleur accompagnement des victimes au niveau local, d’amplifier nos politiques publiques en faveur de l’égalité réelle. Cela passe par la formation des agents, le renforcement des dispositifs d’écoute, le travail en réseau avec les forces de l’ordre et la justice.
Enfin, je proposerai que nous relayions, à notre échelle, le message de cette résolution nationale, en adressant un courrier aux associations concernées, pour leur exprimer notre soutien et les informer de cette avancée législative. Trop souvent, ces textes restent abstraits : faisons-en des leviers concrets, ici à Lille.
Mes chers collègues,
Il est temps que la société cesse de détourner le regard. Il est temps que les institutions – toutes les institutions – prennent leur part.
Et il est temps, surtout, que les victimes cessent de porter, en plus de leurs blessures, le poids d’un doute ou d’une culpabilité qui ne leur appartient pas.
Je vous remercie.